mardi 1 mars 2011

Les régimes politiques et la " nouvelle Tunisie"

Les démocraties se distinguent par l’existence d’une pluralité de partis politiques, par la liberté de choix laissée aux citoyens et par la distinction des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Les régimes politiques, en Droit contemporain, y vont dans ce sens.

* Définition d’un régime politique : tout d’abord, un régime, ou regimen en latin, c’est l’action de diriger, de commander ou d’administrer.
Le concept de « régime politique » peut être défini de différentes manières : c’est le mode d’organisation des rapports entre les différents pouvoirs publics ou bien le mode constitutionnel selon lequel l’Etat exerce son pouvoir par exemples.
Pour moi, un régime politique c’est le mode d’organisation et d’administration d’un Etat ou en d’autres termes le mode selon lequel l’Etat gouverne.

* Les différents types de régimes politiques : historiquement en Droit constitutionnel, des typologies variées de régimes politiques ont existé.
En Droit constitutionnel antique et classique, on parlait plutôt de typologies de gouvernement (l’institution de l’Etat chargée du pouvoir exécutif) : démocratie, oligarchie, tyrannie, royauté, aristocratie, etc.
 Aujourd’hui, la plupart des régimes occidentaux sont démocratiques. Pour ce qui est des régimes des pays en voie de développement ou de tiers monde, ils sont démocratiques sur le papier (la Constitution en d’autres termes), cependant, l’application reste à désirer, le plus souvent.
Un deuxième critère de distinction existe : les régimes politiques. Il peut ici, y avoir une confusion des pouvoirs (exécutif et législatif) et on aura soit une confusion au profit du pouvoir exécutif avec le régime présidentialiste (ancien régime de Ben Ali) ou une dictature (ancien régime de Ben Ali aussi), soit au profit du pouvoir législatif avec le régime d’Assemblée. Sinon, il peut avoir une séparation des pouvoirs, où, on aura un régime présidentiel, un régime parlementaire ou régime mixte entre les deux.
Un troisième critère de distinction qui ne nous concerne pas particulièrement : la séparation verticale des pouvoirs. On aura un Etat unitaire centralisé ou décentralisé (ça pourrait nous intéressé dans le futur) ou un Etat fédéral.

* Etude des types modernes de régimes politiques : régime présidentiel, régime parlementaire et régime mixte. En pratique, ils sont matérialisés par des modèles types, respectivement : le modèle américain, le modèle anglais et le modèle français.

Le régime présidentiel : il est repris à la lettre en pratique par le modèle américain dés 1787. Il est caractérisé par une stricte séparation des pouvoirs : le pouvoir législatif a le monopole de l’initiative et la pleine maîtrise de la procédure législative et le pouvoir exécutif, qui dispose d’une légitimité fondée sur le suffrage universel, ne peut être renversé ; le pouvoir judiciaire totalement indépendant dispose de larges prérogatives.
La principale caractéristique du régime présidentiel réside dans le mode de désignation du chef de l’État, élu au suffrage universel direct ou indirect. Le président jouit ainsi d’une forte légitimité qui fonde les larges pouvoirs dont il dispose. Il a le pouvoir de nommer et de révoquer les ministres (aux Etats Unis ils sont appelés « secrétaires d’Etat » pour montrer leur rôle moindre dans la prise de décision) et a autorité sur eux. L’exécutif relevant du seul président, celui-ci est à la fois chef de l’État et le chef du Gouvernement. Sa responsabilité politique ne peut être mise en cause par les assemblées, mais, réciproquement, il dispose de peu de moyens de contrainte à leur égard, en d’autres termes, moyens de contrôle réciproque. En effet, il ne peut pas les dissoudre et dispose seulement d’un droit de veto sur les textes législatifs qui ne lui conviennent pas.
Les assemblées parlementaires détiennent pour leur part d’importantes prérogatives de législation et de contrôle. Elles ont ainsi la pleine maîtrise du vote des lois et le monopole de l’initiative législative. Elles disposent également de moyens d’investigation très poussés sur le fonctionnement des services relevant de l’exécutif.

Le régime parlementaire : il est matérialisé en pratique par les modèles de la Grande-Bretagne, l’Australie, l’Inde, Canada, etc. il s’agit du régime de collaboration des pouvoirs entre le corps législatif (le Parlement) et le corps exécutif (le Gouvernement). Dans ce régime, le Gouvernement, conduit par le Premier Ministre, n'est pas élu directement par le peuple ; son investiture est conditionnée par la majorité ou la coalition qu’il a obtenue au Parlement lors des élections législatives.
Dans bien des cas, lorsque le gouvernement dispose d'une solide majorité de sièges, le parlement suit « aveuglément » son gouvernement du fait de la règle souvent non-écrite mais très répandue et surtout suivie, qui oblige les parlementaires à respecter les directives de leur parti lors des votes. Des votes qui seront prévisibles et l'appui aux projets gouvernementaux quasi automatiques. Le parlement devient pendant la durée du mandat un lieu de débat, de contestation, d’adversité et d’échanges. La collaboration des pouvoirs, caractéristique première d'un régime parlementaire, est alors marquée par la «prépondérance du gouvernement».
Le régime parlementaire se distingue du régime d’assemblée par une plus grande séparation des différents pouvoirs et par l’existence de mécanismes de régulation en cas de désaccord entre l’exécutif et les assemblées parlementaires (exemple : motion de censure, questions au Gouvernement, etc.).
La principale caractéristique de ce régime réside dans la nécessité pour le Gouvernement (chargé de l’exécution des lois et de la direction de la politique nationale) de disposer de la confiance de la majorité parlementaire : il est donc responsable devant elle et doit remettre sa démission s’il ne dispose plus d’une majorité. Pour cette raison, l’exécutif est dissocié entre le chef de l’État et le Gouvernement. Le premier, qui peut être un monarque ou un Président (élu ou nommé), incarne la continuité de l’État et ne participe pas à l’exercice du pouvoir en dehors de la nomination du chef du Gouvernement. N’ayant pas, en principe, de rôle actif, généralement il dispose d’un rôle cérémoniale mais parfois le rôle de garant de certains principes universels, il est politiquement irresponsable. En revanche, le chef du Gouvernement et ses ministres assument la conduite de la politique nationale sous le contrôle des assemblées parlementaires : l’autorité et la responsabilité politique sont ainsi étroitement liées. Pour cette raison, la plupart des actes du chef de l’État doivent être contresignés par les membres du Gouvernement concernés.
Le fonctionnement du régime parlementaire implique une étroite collaboration entre le Gouvernement et les assemblées. Le plus souvent les membres du Gouvernement sont choisis parmi les parlementaires et ont accès aux assemblées. Le Gouvernement dispose par ailleurs de l’initiative législative et participe à l’élaboration de la loi. Compte tenu des risques de blocage pouvant résulter de la mise en cause de la responsabilité du Gouvernement ou de la perte de confiance dans l’une des chambres, un pouvoir de dissolution. Le renversement du Gouvernement ou la dissolution apparaissent ainsi comme deux mécanismes de régulation permettant de surmonter les tensions qui peuvent survenir entre le Gouvernement et sa majorité. La dissolution présente, en outre, l’intérêt de solliciter l’arbitrage des électeurs.
Le régime parlementaire peut avoir donc deux formes : le régime dualiste ou bien moniste. Pour le régime parlementaire dualiste, il s’agirait d’un régime parlementaire dans lequel le chef de l’Etat joue un rôle politique important. Cette forme du régime parlementaire se traduit par la double responsabilité où le Gouvernement est non seulement responsable politiquement devant le Parlement, mais aussi devant la chef de l’Etat. Il se traduit aussi par le droit de dissolution qu’appartient au chef de l’Etat de manière discrétionnaire. Pour le régime parlementaire moniste, il s’agirait d’un régime parlementaire dans lequel le chef de l’Etat s’efface. Mais, il évoluera dans deux directions opposées. Soit une absence totale du rôle du Chef de l’Etat ; un régime qui se caractérise par une instabilité ministérielle puisque la disparition de facto du « droit de dissolution » prive l’exécutif de son arme de dissuasion à l’égard du Parlement. Le régime est déséquilibré puisque les députés peuvent renverser le Gouvernement sans crainte d’être renvoyés devant leurs électeurs. Cette situation est renforcée par le multipartisme indiscipliné qui sévit et par l’idéologie de la souveraineté parlementaire. Pour le dépasser, la solution c’est la rationalisation (ou le régime parlementaire rationalisé) afin d’éviter les renversements intempestifs de Gouvernement. Cette technique sera souvent utilisée avec plus ou moins de succès (un régime à éviter vu l’instabilité politique de la Tunisie actuellement). Soit le régime parlementaire à l’anglaise ou gouvernement de Cabinet où la stabilité ministérielle y est si forte que le plus souvent on peut parler de Gouvernement de législature. Le Gouvernement pendant son mandat peut ainsi mettre en œuvre sa politique. Le bipartisme rigide anglais explique en grande partie cette situation. En effet, il conduit à l’existence d’une majorité cohérente, stable et solide ainsi qu’à la quasi-élection du Premier ministre au suffrage universel. Cela entraîne quelques conséquences paradoxales. On constate en effet la quasi-disparition de la responsabilité politique du Gouvernement ainsi que la transformation du rôle de la dissolution qui devient un moyen de choisir le meilleur moment pour organiser les élections législatives.

Le régime mixte : ce régime correspond à celui du modèle français depuis l’introduction de l’élection du président de la République au suffrage universel direct. On y trouve certaines caractéristiques du régime présidentiel : le chef de l’État, élu par le peuple, choisit et révoque les membres du Gouvernement, s’il dispose d’une majorité parlementaire conforme à ses vues. Le régime mixte emprunte aussi des éléments au régime parlementaire : le chef du Gouvernement est distinct du chef de l’État et sa responsabilité peut être mise en cause par l’une des deux assemblées. Le chef de l’État dispose du pouvoir de dissolution et le Gouvernement bénéficie d’importantes prérogatives dans la procédure législative. Un tel régime ne peut fonctionner qu’en cas d’accord entre le chef de l’État et la majorité parlementaire : dans une telle configuration le chef du Gouvernement est doublement responsable (devant le président de la République et devant le Parlement qui exerce le pouvoir législatif en adoptant des lois et contrôlant le pouvoir exécutif. Dans le cas contraire, le régime fonctionne comme un régime parlementaire à part entière, le président cède sa prééminence au Premier ministre. C’est le cas de figure de la « cohabitation ».

NB : juste pour information, j’ajoute une présentation d’un régime historique celui du régime d’assemblée ou conventionnel qui est un système institutionnel dans lequel tous les pouvoirs procèdent d’une assemblée élue au suffrage universel direct (droit de vote accordé à tous les citoyens majeurs). Celle-ci élit en son sein des comités qui exercent les fonctions exécutives et, le cas échéant, judiciaires. Un tel régime est caractérisé par la confusion des pouvoirs et par l’omnipotence du Législatif. Il n’est le plus souvent pratiqué qu’à titre transitoire par des assemblées chargées d’élaborer une constitution.

En résumé, et à mon sens, le régime qui convient le mieux à la « nouvelle Tunisie » pour ne pas se contenter dans un mimétisme et parler de deuxième république, c’est un régime mixte ou il y aurait un partage stricte des pouvoirs entre le pouvoir exécutif (incarné par le Chef d’Etat élu au suffrage universel direct) et le pouvoir législatif (représenté par un Chef de Gouvernement). Un partage à l’instar de l’article 34 de la constitution actuelle avec un énoncé restrictif des pouvoirs du Chef de l’Etat et le reste est administré par le Chef du Gouvernement. Je préconise aussi un décalage entre les élections présidentielles et les élections législatives pour permettre aux citoyens de sanctionner l’un ou l’autre des pouvoirs en cas de politique contestée. Enfin, l’obligation d’avoir une Justice constitutionnelle indépendante et ouverte au citoyens (avec des conditions bien précises) et surtout un pouvoir judiciaire totalement indépendant (justice judiciaire et administrative) sans oublier le pouvoir des médias qui doit être un véritable quatrième contre-pouvoir totalement libre.

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